L’étude posturale

J’avais déjà entendu parler de l’étude posturale sur un vélo. En gros, ce n’est pas un truc très sorcier. Cela consiste à faire comprendre à votre vélo que vous êtes mal foutu et qu’il doit s’accommoder de vos difformités pour qu’elles se voient le moins possible.
Et pour cela, le passage par un kiné (ou équivalent) spécialisé est nécessaire.
L’étude posturale est intéressante dans les cas suivants (liste non exhaustive) :

  • Vous comptez traverser l’Atlantique en pédalo et vous voulez être certain du modèle de flotteur à utiliser.
  • Vous êtes plutôt du style endormi et vous vous demandez si un vélo couché ne risque pas de vous être fatal
  • Vous comptez jouer la gagne au prochain Cape Epic mais Nino Schurter refuse de vous prêter ses jouets
  • Vous en avez marre que votre mère vous dise « tiens toi droit » à chaque occasion
  • Vous avez une journée pluvieuse en vue et le nettoyage du vélo ne vous tente pas.
  • Votre selle est cassée alors autant en acheter une qui ne vous écrase pas les roubignolles et  ne vous coûte pas la peau du cul.
  • Vous êtes mal foutu et vous ne voulez pas aggraver des choses

Bref, ce ne sont pas les motivations qui manquent.


J’ai fait ma petite étude de marché et j’ai lu beaucoup de bien sur le système mis en place par Specialized dans des magasins, pompeusement nommés, « Concept Stores ». Ce concept, le BG Fit, consiste à vous analyser dans tous les sens afin de définir avec précision les positionnements des différents éléments de votre bécane. Vous, c’est quand même trop tard pour changer, alors autant faire comprendre ce que l’on souhaite à une machine plus intelligente : le vélo.


Après quelques échanges de mails et un appel téléphonique pour définir les modalités (ben oui … ce n’est pas gratuit), un rendez-vous est pris un samedi pluvieux d’octobre.
J’arrive donc avec mon vélo que les techniciens ont prévu d’installer sur des rouleaux. C’est sans compter que, parait-il, mon système de fixation de roues n’est pas standard (un axe traversant DT Swiss 12×142). Bon … cela commençe bien … sans vélo.


Heureusement, le magasin possède une espèce de vélo d’appartement qui peut être dimensionné à n’importe quelles cotes. Il possède des vis, des vérins, des boulons, des tiges filetées, … dans tous les sens. Il suffit d’y installer mon guidon pour retrouver le même positionnement que sur mon Santa-Cruz. Ce n’est pas le vélo que je choisirais pour un Cape Epic mais cela devrait faire l’affaire … pensait-on J.


Mais voilà, le diamètre de mon cintre est de 35mm et leur standard est de 31.8mm. Le 35mm est quand même apparu en 2011 et s’est répandu en 2014 dans les vélos de DH et d’Enduro.
Bref, on a fini par me trouver un cintre devant faire l’affaire.


Le kiné s’est inquiété de mes attentes et m’a mesuré et scruté dans tous les sens, en me faisant prendre des postures parfois bizarres. Il a mesuré ma souplesse qui tient plus du chêne centenaire que du roseau. Après cela, la déprime a commencé. En résumé : j’ai une jambe plus courte que l’autre (comme le dahu), les pieds en canard et le dos comme un dromadaire. Je m’apprêtais à passer tout le bestiaire en revue et à me caser sur un vélo à 3 roues … quand il a mesuré la taille de mon SIF …


… Ok … je vois à vos têtes ahuries que vous ignorez ce qu’est un SIF. Il s’agit du Sillon Inter Fessier (bandes d’incultes). Certains pourraient penser à un diamètre de trou de balle (la période de la chasse arrive) mais il s’agit  en fait de la distance entre vos deux ischions. Et, non, « ischion » n’est pas le petit nom donné à vos bijoux de famille mais plutôt aux deux os sur lesquels vous appuyez, une fois assis.


Cette mesure en mains (si je puis dire), le choix de la selle a été très facile. Une Specialized Power. Celle-là (selle !) a tout de suite plu à mon tendre postérieur qui s’y est trouvé bien à l’aise. Bon, cela risque d’être un peu tricky dans les descentes techniques car elle est assez large et un peu encombrante quand on doit « passer derrière » mais mon cerveau d’en bas n’en veut pas d’autre. Alors, ce que derrière veut …


Afin d’alléger la pression sur les zones périnéales, la Power est largement évidée en son centre. J’espère juste ne pas m’y retrouver coincé un jour.
Une fois assis, on a remesuré le vélo, la position de mes genoux par rapport aux pédales, la distance entre le bec de selle et le centre du guidon, la hauteur de selle, l’avancement de la selle, … et j’en passe et des meilleures.


Bref … des ajustements, très légers, sont faits. Comme je roule « non clipsé », il n’a pas été nécessaire de régler les cales de mes chaussures.
Durée totale de l’étude : environ trois heures. Coût : 180 euros. Cela les vaut-il ? A priori, oui. Mais je suggérerais de passer à cette étude avant l’acquisition d’un nouveau vélo. Toutefois, ce concept étant celui de Specialized, je doute qu’un vélo d’une autre marque vous soit conseillé.


La première rando post-étude-posturale confirme le très bon choix de selle. Les subtils changements qui ont été faits à mes réglages m’ont également apporté une position, me semble-t-il, plus naturelle et malgré la boue omniprésente, je n’ai pas ressenti de gène dans le bas du dos (oui, un peu plus haut que le SIF) comme souvent lorsque le vélo glisse de l’arrière.

Outil intégré, EDC de OneUpComponent

C’est en remplaçant les roulements de direction de mon biclou que j’ai vu que le cône de direction n’était en fait qu’un grand truc plein de vide. Là, j’ai eu l’idée géniale de me dire que ce serait bien de se servir de cette place pour y caser des trucs que l’on aurait plus à porter sur le dos.

Bon, ok, je vous entends déjà d’ici : je ne suis pas le premier blaireau à y penser car cela existe déjà. Ne cassez donc pas ma joie comme cela ! :siffle:

En cherchant un peu (pas beaucoup en fait), je suis tombé sur le kit EDC (pour Every Day Carry) de chez OneUp Component. C’est une espèce de tube qui se glisse dans le tube de direction et qui contient, à mon avis, tous les outils dont vous pourriez avoir besoin sur la piste.

Je ne vais pas vous en faire la description car tout se trouve sur leur site internet (https://www.oneupcomponents.com/)

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J’ai essayé le dérive chaîne ainsi que le truc pour ouvrir la maille rapide d’une chaîne. Cela semble être du solide.

Ce bidule contient un emplacement pour loger une maille rapide (les deux côtés d’une maille). C’est assez pratique mais ces deux éléments ne sont pas clipsés dans le plastique et ont tendance à tomber par terre quand on ouvre le truc. Je les ai fixés avec un bout de scotch.

Au bout du tube, on peut fixer une bouteille de CO2 ou un autre tube vide qui peut servir à placer un billet, des (petits) colsons, une seconde maille rapide, …. N’espérez pas y stocker toute votre valise mais c’est quand même bien pratique. En tubeless, j’avoue ne pas trop bien voir l’utilité des bouteilles de CO2 et je préfère donc nettement ce petit tube étanche.

Le prix de 59 dollars de cet accessoire ne le rend pas prohibitif (me semble-t-il).

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Ce tube peut être soit enfoncé dans le cône de direction, soit inséré dans une mini-pompe à vélo. J’ai choisi l’option « cône ».

Dans le cône de direction, il faut fixer ce truc. C’est là que le problème arrive. Pour le fixer, il faut d’abord enlever l’étoile du jeu de direction et tarauder un filet dans le tube de la fourche à l’aide d’outil vendu par EDC. J’avoue qu’avec mes deux mains gauches, j’étais un peu réticent à me lancer dans ce bricolage et, au pire, à foutre ma fourche en l’air. Mais très honnêtement, cela a été tout seul et cela ne m’a pris que 10 minutes pour installer tout le bazar. Une fois le filet creusé, on visse le support et, hop, c’est tout.

L’outil pour tarauder coûte 35 $. C’est un peu chérot pour une utilisation unique mais, bon, si vous le demandez gentiment, je consentirai (peut-être) à vous prêter le mien.

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OneUp fourni également un bouchon à enfoncer par le bas du cône de direction afin de s’assurer  que tout reste bien étanche. Et, de fait, je me suis récemment fait convenablement rincer (pluie, grêle, boue, drache, …) et tout est resté bien au sec. Evidemment, ce bouchon ne permet plus de fixer un garde boue à cet endroit. Ce kit (25 $) contient également le support à visser dans le tube de fourche.

Je suis vraiment enchanté de cet outil qui est bien pratique et convient pour toutes les interventions courantes. Je ne dois plus me préoccuper de transvaser mes outils d’un sac à l’autre, voire dans mes poches, quand je change de configuration vestimentaire. Tout est sur le vélo (et plus sur mon dos), au sec et au propre.

Si ce bidule vous intéresse, il est primordial de vérifier si votre fourche est compatible. Les plus courantes conviennent sans problème.

Là, je vais commander la version dans une pompe à air pour le vélo de mon épouse.

Si cela peut aider quelqu’un, j’espère qu’il profitera de mon expérience.

Eric

VTT dans les Cornouailles

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Bonjour Tonton Charlie et Tata Camomilla,


Je voulais vous remercier pour votre charmante invitation à venir faire de la vélocyclette tous terrains sur vos terres du Devon, dans les Cornouailles. Je vous suis également reconnaissant pour le grimoire (NDLR : Vertebrate Publishing) que vous m’avez envoyé qui décrit avec précision les plus beaux chemins de vos villages. Nous ne doutions pas qu’il nous permettrait de choisir nos traces avec plus de précision. Pas sécurité, j’ai retranscrit les plus intéressants (ceux qui partent du château) sur un nouvel appareil qui m’a été fourni par le Mage Garminus, à savoir le gousset pour sirculer (*), plus communément appelé GPS.

Le trajet aller ne nous a pas posé de problème si ce n’est qu’il a coïncidé avec le premier jour de congés d’été des enfants de vos serfs et cela a occasionné énormément de bouchons de carioles de toutes sortes sur les routes, déjà très étroites, de votre comté.

Nous sommes passés devant Hastings qui nous a rappelé de bien tristes souvenirs pour votre famille. Heureusement, Sir Christopher vient de venger votre honneur, pour la quatrième fois, en la mettant bien profond aux fromages qui puent.

Nous avons commencé par passer quelques jours dans votre castel du Devon, dans le parc impérial du Dartmoor. L’arrivée à l’hôtel au château a été parfaite. Vos laquais ont bien pris soin de nos vélocipèdes pendant que les servantes nous installaient dans notre suite. A ce propos, je dois vraiment vous féliciter pour la qualité et l’amabilité de votre petit personnel. Celui-ci sied comme il se doit à votre rang et vous pouvez être fier du travail qu’il réalise.

Pour notre premier jour, la météo n’était pas terrible aussi avons-nous choisi une trace pas trop longue avec un faible dénivelé qui nous a emmenés dans des coins pas trop éloignés du château. Vos jardiniers ont fait un travail remarquable et la région est magnifique.

Pourrais-je quand même vous suggérer de leur demander de tailler les fougères qui, par moment, étaient plus grandes que nous ? A certains endroits, elles formaient un réseau aussi impénétrable que Laidie Camomilla. Une machette nous aurait été bien utile (pour les fougères, je veux dire).

Le petit GPS nous a été fortement sollicité car certains chemins étaient vraiment invisibles et très difficiles à trouver. Les chemins empruntés sont principalement rocailleux mais nous avons également beaucoup apprécié de grandes traces dans de l’herbe tondue bien rase par vos moutons. A ce sujet, ne vous inquiétez pas trop des moultes livres de piece of shit de divers animaux croisés tout au long de nos périples avec lesquelles  nous sommes rentrés au château. Vos valais nous ont confié un nettoyeur à haute pression qui a bien fait l’affaire.

Puis-je également suggérer à vos cochers de chausser les carrosses avec des pneus sans tube (des tubeless, quoi !) ? Et si c’est déjà le cas, de rajouter une dose de lait de caoutchouc. Sans cela, les nombreux arbustes à épines auraient taillés en pièces nos jantes (déjà que nos mollets et chevilles, ce n’était pas triste). A l’avant, je privilégierais des chausses disposant d’une bonne accroche (tels des Maxis High Roller II) tandis que les roues arrières se contenteraient de modèles privilégiant la motricité. Grâce à l’excellent drainage de vos terres, la grosse boue qui colle est quasi inexistante. Nous vous remercions d’avoir demandé à vos villageois d’organiser une fête rien que pour nous. Le concours de chiens (où nous avons remis, en personne, le prix du meilleur chien à six pattes) ainsi que la course de canards ont été particulièrement appréciés. Le concours de tartes n’a pas non plus été oublié ni le lancer de noix de coco.

Le lendemain, nous avons choisi une trace plus conséquente, classée « noire » qui ne faisait pourtant que 32 Km et 700 mètres de dénivelé positif. Une fois de plus, nous avons pu apprécier la beauté sauvage de votre comté ainsi que les passages parmi les nombreux animaux laissés en semi-liberté, sans compter les traversées de jungles de fougères, ronces et genévriers. Les nombreuses grimpettes n’étaient pas piquées des sauterelles et, en finalité, nous avons largement dépassé le dénivelé annoncé. A ce sujet, pourrais-je vous demander d’intercéder auprès de Grand-Tante Lizbeth afin qu’elle envoie le prévôt et quelques uns de ses sbires expliquer au bastard de scribe qui a rédigé ce grimoire comment calculer correctement un dénivelé ? Il me semble que lui empaler le doigt dans l’œil pourrait suffire à ce qu’il comprenne qu’entre 700 et 1100, il y a une sacrée différence.

A la fin de cette journée, une bière locale a été très appréciée. Celle-ci est produite par un de vos Ducs qui est en charge de la prison locale où le brassage se fait dans une cellule. Ce donjon a la réputation de ne laisser ressortir personne et le Duc semble bien y veiller. C’est probablement de là qu’il tient son surnom de wanker Trou Duc.

Le lendemain, nous sommes partis vers votre résidence du nord, dans le parc national de l’Exmoor où nous avons pris nos quartiers dans une demeure accrochée à la falaise, le long du Bristol Chanel. Comme d’habitude, cette situation nous a permis de rayonner depuis ce point.

Le départ de notre tracé (« rouge ») du jour tenait plus de l’escalade que du pédalage aussi avons-nous privilégié … le poussage. Cela nous aura été bien utile pour la suite de la journée. Arrivé en haut des falaises, nous avons dialogué avec quelques uns de vos poneys du Devon tandis que les paisibles grosses vaches à longs poils et larges cornes nous laissaient passer sans problème. Les nombreux lapins présents dans la région ne doivent pas être ignorés car ils creusent pas mal de trous (jouettes qu’ils sont) qui peuvent être fatals aux cavaliers. De nombreuses descentes demandent un bon niveau technique de la part des chevaliers mais on ne peut pas affirmer qu’elles soient dangereuses. Au pire, il sera nécessaire de trouver une petite soubrette pour ôter, une par une, les épines de muriers de nos fesses une fois rentrés au bercail. La météo nous a gratifiés d’un ciel bleu durant toute la journée et c’est le visage en banane que nous nous sommes arrêtés dans un pub pour déguster une bonne bière (Fat Belly) brassée sur place. Quel beau territoire vous possédez là.

Au sujet du ravitaillement, ne pensez-vous pas qu’il serait utile de prévoir quelques relais afin de sustenter les chevaliers qui parcourent vos terres ? Il n’y a, en effet, que très peu d’endroits où se ravitailler en cours de route et il s’agit d’être prévoyant « à l’avance ».

Nous avons profité d’une journée de pluie pour rendre visite à vos serfs du village voisin. Nous avons pu trouver un de ces commerçants qui proposent encore des services aux vélocyclopédistes. Cette échoppe était très bien achalandée et nous y sommes restés plusieurs heures en profitant également du bar qui s’y trouve intégré. Il n’y a pas à dire mais vos sujets savent ce que les chevaliers actuels attendent.

Le trace « noire » que nous avons choisie ensuite ressemble plus à du steaple chase ou à une fox hunt qu’à une randonnée en vtt mais c’est avec bravoure que nous nous sommes lancés dans l’aventure. Le matériel, mécanique et humain, est soumis à rude épreuve et ce serait gageure que de se lancer dans une telle aventure sans prendre un minimum de précautions et de tenir compte que la couverture téléphonique sans fil est plus qu’aléatoire dans ces régions reculées. Il n’est pas non plus inutile de prévoir un pourpoint de réserve dans la besace dorsale d’autant que le ciel, parfois capricieux, peut nous faire passer, en une seule journée, par les quatre saisons, et cela sans Vivaldi. But as you know, we don’t give a shit to (Bart) ze wezer.
Le terme Singletrack prend ici tout son sens. Il y a tout juste la place pour poser la largeur d’un pneu et on se demande même comment le cintre arrive à se faufiler entre les différents obstacles que des malandrins ont placés sur le chemin au cours des siècles.    

Cette semaine nous aura permis de parcourir 20 lieues (NDLR : une lieue valant 3 milles impériaux, vous n’aurez qu’à faire le calcul 😁 ) pour un dénivelé total de 9843 pieds. Ce qui, à priori, peut ne pas sembler être extraordinaire, mais Damn You, nos jarrets s’en souviennent encore. Encore une fois, chère oncle Charlie, nous vous remercions pour ces excellentes vacances que nous avons passées en vos lointains territoires.

Thank you and do not forget to make the bise to Kate.


Damoiseau Eric & Dame Valérie

(*) certains mots ont été adaptés du vieux français et ne sont peut-être plus en usage actuellement.
PS : Si quelques libertés historiques ont été prises, tous les événements relatés ici sont rigoureusement exacts. Seuls les noms des différents protagonistes ont été changés afin de protéger leur intimité.